Conversation

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Conversation

 Il n’y a pas toujours eu qu’une épicerie à tout faire au village. Il y avait plusieurs commerces dont une boucherie.

C’était ma première destination en arrivant l’été, ma priorité, la boucherie, pour l’approvisionnement en viande d’abord, et en viande de qualité, rien à voir avec ce qu’on achète au supermarché, et pour avoir des nouvelles du pays, savoir ce qui s’était passé d’important pendant l’hiver, les décès, les naissances, les mariages, la pluie, le soleil et leurs influences sur les récoltes…

Cette année là, j’étais, comme d’habitude, allée aux nouvelles chez la Josette, la bouchère, histoire d’être un peu au courant et de savoir de quoi on parlait au village, de pouvoir participer aux conversations. Il y avait des chaises dans sa boucherie pour les clients, alors on prenait son temps et on bavardait.

La Josette servait une cliente et j’attendais mon tour sur ma chaise à coté de madame Germaine.

Elle était déjà bien vieille, mais toujours chez elle. Ce devait être peu de temps avant qu’elle n’entre en maison de retraite. Elle n’entendait déjà plus bien mais tenait à participer à la conversation et, quand elle parlait, elle avait du mal à retenir son dentier et on avait du mal à la comprendre….

On en vint à parler du mariage de Géraldine.

– La Géraldine, la fille à l’Andrée, vous la connaissez bien, me dit Josette.

Bien sur que je la connaissais, c’était une cousine, il faut dire qu’au village, on est tous plus ou moins cousins, et Andrée faisait partie de ceux qui m’accueillaient lorsque je venais en vacances, enfant…

– Et son futur mari, vous le connaissez ?

–  Non, je venais d’arriver, je n’avais pas encore eu le temps de lui être présentée…

– Oui, je savais qu’il était Africain, du Niger…

Madame Germaine se tourna alors vers moi, me tapa sur le bras et chevrota :

– Vous parlez du fiancé de la Géraldine, eh ! ben, j’l’ai vu, moi… ben il est noir son futur mari à la Géraldine et ben noir… mais ben gentil, ben élevé, m’a ben dit bonjour… mais pour sûr il est noir… et  moi, des noirs, j’en avais jamais point vu qu’à la télé !


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